La décision des États-Unis d’Amérique de délocaliser au Togo la délivrance des visas pour les ressortissants Burkinabè a fait l’effet d’un coup de tonnerre à Ouagadougou. Officiellement, Washington évoque des manquements aux règles d’utilisation des visas par certains Burkinabè. En réalité, cette mesure semble s’inscrire dans une logique de pression diplomatique, bien plus politique qu’administrative.
Selon les propos du ministre Burkinabè des Affaires étrangères, Karamoko Jean Marie Traoré, ce geste américain ferait suite au refus du Burkina Faso d’accueillir des migrants expulsés des États-Unis, y compris des personnes non Burkinabè. Une proposition jugée « indécente » par le gouvernement, qui y voit une tentative d’imposer au pays un rôle de décharge migratoire pour une puissance étrangère.
En réponse, Ouagadougou campe sur une ligne claire. Le Burkina Faso ne sera pas une terre de déportation, mais une terre de dignité. Une formule forte, qui illustre la volonté de plus en plus affirmée du pays de défendre sa souveraineté et de refuser toute forme d’ingérence.
Mais cette posture, aussi légitime soit-elle, n’est pas sans conséquences. En transférant la délivrance des visas à Lomé, les États-Unis compliquent sérieusement l’accès à leur territoire pour les Burkinabè, en particulier les étudiants, les chercheurs, les entrepreneurs ou les familles. Ce sont donc les citoyens ordinaires qui paient le prix de cette tension diplomatique.
Au-delà du différend bilatéral, cette affaire révèle une évolution des rapports entre l’Afrique et les puissances occidentales. Le temps où certains pays acceptaient sans sourciller les diktats venus d’ailleurs semble révolu. Le Burkina Faso, comme d’autres nations africaines, revendique désormais une relation d’égal à égal, fondée sur le respect mutuel, et non sur le chantage déguisé en coopération.
Washington, en choisissant la voie de la sanction consulaire, donne l’image d’une puissance qui peine à s’adapter à un monde multipolaire, où les peuples cherchent à maîtriser leur destin. Ce type de mesure ne fait qu’alimenter le ressentiment, renforcer les discours souverainistes et éloigner un peu plus les États-Unis de certains partenaires stratégiques.
Dans un contexte où le Burkina Faso redéfinit ses alliances et ses priorités, cette crise diplomatique pourrait bien marquer un tournant symbolique. Celui d’un pays prêt à sacrifier un privilège pour défendre un principe. Et ce principe, c’est la dignité nationale, que rien, ni visa, ni pression ne saurait acheter.
Parce qu’un visa peut s’obtenir ailleurs. La dignité, elle, ne se négocie pas.
Yankee KILO ZULU

Leave feedback about this